Qui hérite en l’absence de testament ?

Il existe bien des cas où une personne décède sans laisser de testament. Autrement dit, la personne qui a passé l’arme à gauche ne laisse pas trace d’une volonté de transmettre son patrimoine. Dans un tel cas de figure, qu’est-ce qu’il y a lieu de faire ? Quelle est la conduite à tenir ? Qui peut succéder ? Tour d’horizon de ces différentes interrogations.

L’ouverture de la succession

Le décès est la seule condition d’ouverture d’une succession. Cela suppose que le document qui témoigne de l’ouverture de la succession est l’acte de décès. Il doit y être obligatoirement mentionné la date, l’heure, l’état civil et le dernier domicile de la personne défunte. Ainsi, le lieu d’ouverture est le dernier domicile associé au défunt. C’est également le début de la succession qui matérialise l’indivision entre les divers héritiers.

La loi considère deux conditions cumulatives pour qu’une personne puisse prétendre à la succession. La première veut que la personne susceptible de succéder soit vivante lorsque décède la personne dont la succession est désormais ouverte (Code civil français – Art. 725). La seconde condition stipule qu’une personne ne peut prétendre à la succession que si elle n’a pas été déclarée indigne par la législation sur la base de torts ayant été occasionnées vis-à-vis du défunt ou de sa mémoire (Code civil – Article 726 et suivant).

Par ailleurs, en l’absence de document testamentaire, seules les personnes liées au défunt par un lien de parenté peuvent prétendre à la succession. En l’absence de légataires, l’Etat pourra alors bénéficier des biens. C’est dire que la transmission des biens du défunt est organisée par la loi.

La recherche des héritiers

La détermination des légataires légaux se fait sur la base de deux corps de règles essentiels à savoir :

  • les règles de l’ordre et du degré de parenté ;
  • les règles applicables lorsque le défunt meurt en laissant derrière lui un conjoint.

L’ordre et le degré constituent les règles de dévolution en matière de succession. Elles stipulent un classement des appelés à la succession en fonction d’un ordre et d’un degré au sein de cet ordre.

La règle de l’ordre

On distingue ici quatre ordres de succession.

  • Le 1er ordre regroupe les descendants du défunt, c’est-à-dire ses enfants et petits-enfants.
  • Le 2ème ordre rassemble les ascendants et collatéraux privilégiés. Il s’agit du père, de la mère, des frères, sœurs et neveux du défunt.
  • Le 3ème ordre est celui où se trouvent les ascendants ordinaires. Il s’agit des grands-parents et des arrières grands-parents.
  • Le 4ème ordre de succession regroupe les collatéraux ordinaires, c’est-à-dire les oncles, tantes et cousins jusqu’au 6ème degré du défunt.

Les légataires d’un ordre supérieur perdent systématiquement leurs positions par rapport à ceux d’un ordre inférieur.

La règle du degré

Elle s’applique à l’intérieur d’un ordre. L’héritier d’un degré plus éloigné est d’office évincé par celui d’un degré inférieur.

Au regard de cette organisation de la dévolution successorale, on constate que la présence d’enfants du défunt exclut à elle seule tous les autres prétendants à la succession et donne priorité aux enfants du de cujus. Ceux-ci disposent tous du même droit, qu’ils soient issus du mariage du défunt ou pas, qu’ils soient adoptifs ou adultérins. Au cas où un des enfants décéderait, ce sont ses enfants à lui (petits-enfants du défunt) qui prétendront à la succession.

Lorsque le défunt a un enfant, il héritera automatiquement de la moitié des biens de la succession. S’ils sont deux, ils se partageront les deux tiers. Si le nombre des enfants est supérieur à trois, ils se partageront les trois quarts. Aucun enfant ne peut être déshérité sur ces parts ; c’est le minimum légal que la loi leur accorde. Toutefois, il existe des exceptions aux règles de l’ordre et du degré

La principale exception en l’occurrence est le principe de la représentation. Il permet à un ou plusieurs enfants de représenter leur père ou leur mère pour la succession de la défunte ou du défunt. Ce principe ne s’applique que dans des cas très particuliers.

Le cas du conjoint survivant

Lorsque le de cujus décède en laissant un partenaire et des enfants issus de leur union, la loi offre au conjoint survivant deux options de succession. Il peut recueillir :

  • tout en usufruit ;
  • un quart en pleine propriété.

Dans le cas où le conjoint survivant ferait le choix de l’usufruit, les enfants du défunt se partageront la nue-propriété à parts égales. S’il choisit le quart en pleine propriété, les descendants se partageront les trois quarts restants, et ce en procédant à des subdivisions égales.

Au cas où le de cujus laisse des enfants d’un autre lit (issus d’une autre femme), alors le conjoint survivant ne peut que recueillir le quart de la succession en pleine propriété.

En l’absence d’enfant, lorsque le conjoint survivant se retrouve à succéder avec les ascendants du défunt, il a droit à la moitié de la succession. Quant aux ascendants, ils recueillent chacun un quart. Si ce n’est que l’un des ascendants du défunt qui est présent à la succession, le conjoint survivant recueille alors trois quarts et l’ascendant vivant un quart.

En l’absence de descendants et d’ascendants, le conjoint survivant reçoit en héritage la totalité de la succession et évince sans débat les frères et sœurs du défunt ou toute autre personne qui prétend avoir droit à la succession. Par ailleurs, il est à noter que le conjoint survivant bénéficie de droits au logement dont l’incidence n’est pas à négliger. Il s’agit du :

  • Droit temporaire au logement : c’est un droit que le mariage confère au conjoint survivant et dont il ne peut être privé. Il s’exerce contre la succession.
  • Droit viager au logement : seul le document authentique de legs peut en priver le conjoint survivant.

Le cas des héritiers réservataires et des donations antérieures

Les bénéficiaires réservataires sont ceux à qui une partie de la succession est réservée, peu importe les conditions. Ils ne peuvent en être privés. Par cette parade, la loi vise à protéger les enfants du défunt. S’ils n’existent pas, et à défaut de descendants, le conjoint survivant est réservataire.

Par le passé, les ascendants avaient le statut de réservataires en l’absence d’enfant. Par conséquent, si le de cujus avait effectué des donations au profil de son ascendance de son vivant, il serait opportun de s’assurer que ces donations n’ont pas affecté la réserve des descendants, ou du conjoint survivant en l’absence de descendants. Si les donations ont été excessives, les bénéficiaires réservataires d’un legs pourraient mener une action en réduction de donations.

Les souplesses permises par la loi

En l’absence d’acte sous seing privé ou d’acte notarial organisant la succession, des alternatives existent. En règle générale, la succession s’ouvre dès le décès. Or, en attendant qu’ils soient partagés, les biens sont en indivision et appartiennent à l’ensemble des successeurs. Si avant la réforme des successions, le principe voulait que toute décision relative aux biens indivis soit prise à l’unanimité des intéressés, certaines décisions peuvent désormais être prises à la majorité des deux tiers des bénéficiaires du legs.

Cette mesure vise à remédier à la gestion difficile des biens, qui menait souvent à des situations de conflit et de désaccord. Elle s’applique à la vente des biens meubles et des portefeuilles d’actions, ou pour décider de la mise en location d’un bien. Toutefois, l’unanimité est de mise pour les décisions importantes.

Le mandat posthume, la donation ou le partage aux petits-enfants, ainsi que le pacte successoral, restent des alternatives en l’absence de document testamentaire. Chacune de ces options a ses particularités.

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