Qu’est-ce que la résiliation judiciaire du contrat de travail ?
La résiliation judiciaire est un cas particulier de rupture du contrat de travail. Elle est engagée à l’initiative du salarié, qui introduit une demande auprès du conseil de Prud’hommes. L’acceptation de la demande est tributaire de certaines exigences. De même, elle a des conséquences pour l’entreprise. Ce sont ces différents aspects qui seront abordés tout au long de cet article.
Qu’est-ce que la rupture judiciaire du lien de travail ?
Il s’agit d’un mode de rupture du lien de travail, plutôt méconnu. En règle générale, cette rupture est initiée par le salarié, devant le conseil de prud’hommes, en raison de manquements de l’employeur à ses obligations. Comme la démission et la prise d’acte, c’est pour le salarié, un moyen de mettre fin à la relation contractuelle de travail le liant à son employeur, lorsqu’il note à l’encontre de ce dernier, des manquements graves, ne permettant la poursuite effective et de façon normale de la relation de travail.
Pour agir, le salarié doit formuler sa demande par courrier, ou la déposer en mains propres, auprès du conseil prud’homal compétent. Il peut s’agir du conseil prud’homal du lieu d’exercice de son travail, du lieu où le lien de travail a été établi, ou simplement du lieu où se situe le siège social de l’entreprise avec qui il a contracté. Il peut également mettre en œuvre sa procédure auprès du conseil du lieu de son domicile, s’il travaille à domicile, ou en dehors de tout établissement (salarié travaillant sur des chantiers par exemple).
Quelle est la conduite à tenir une fois la demande de rupture initiée ?
Une fois que le salarié a introduit sa demande auprès du conseil prud’homal, il continue à exécuter normalement toutes les obligations liées à son travail, pendant tout le temps que durera la procédure. C’est dire qu’il demeure au sein de l’entreprise. Il ne pourra la quitter que si le conseil prononce la rupture de son lien de travail avec l’entreprise.
C’est en cela que se trouve la principale particularité de cette procédure. En effet, le salarié concerné doit continuer à subir les manquements dont il s’estime victime, et pour lesquels il a initié une demande de rupture auprès du conseil. Ce n’est qu’une fois que le juge aura établi l’effectivité de ces manquements, et se sera prononcé en disposant que ces manquements sont suffisamment graves pour constituer un motif de rupture, que le salarié pourra se libérer de ses obligations.
A ce niveau, il importe toutefois de préciser qu’avant l’aboutissement de la procédure, l’employeur conserve, et continue d’exercer son pouvoir disciplinaire sur le salarié. Dans l’hypothèse où un licenciement intervenait après la demande de rupture, il ne fera l’objet d’examen, que si la demande de résiliation judiciaire, est rejetée. A noter que l’action judiciaire engagée par le salarié, ne peut aucunement constituer un motif de licenciement.
Quelles sont les possibles issues d’une telle demande ?
Avant toute décision, le juge prud’homal doit s’assurer de la véracité des faits invoqués, et avoir la certitude qu’ils sont avérés et existent. Il doit ensuite apprécier les manquements et juger de bonne foi s’ils sont suffisamment graves, pour nécessiter une rupture du lien de travail. En l’espèce, il s’agit des faits intervenus jusqu’au jugement, ainsi que ceux postérieurs à la demande.
Ici, la date des faits est déterminante, au point où s’ils datent de longtemps, le juge pourra considérer que la rupture est infondée. Ceci est également possible si les faits ont cessé ou ont été régularisés.
Lorsque les manquements sont établis et sont suffisamment graves selon l’entendement du juge au point de justifier la rupture, le lien contractuel est rompu à la date de la décision, et aux dépens de l’employeur. En fonction des manquements invoqués, le prononcé de la rupture aura les mêmes effets qu’un licenciement sans raisons réelles et sérieuses. L’employeur devra dans ce cas verser au salarié, plusieurs indemnités dont le montant global sera établi sur la base du barème en application depuis 2017.
En cas d’irrégularité de la procédure de licenciement, le salarié ne peut prétendre à des indemnités. Bien évidemment, le lien de travail devra se poursuivre si les manquements ne sont pas établis ou ne sont pas suffisamment graves.
Existe-t-il une exception quant à la mise en œuvre de cette demande ?
L’action en résiliation judiciaire n’est en règle générale ouverte qu’au salarié, lorsque l’employeur n’exécute pas ses obligations. L’employeur n’a donc pas la possibilité d’agit en ce sens contre l’employé. Pour les contrats à durée indéterminée (CDI) par exemple, l’employeur ne peut exploiter que la voie du licenciement pour résilier unilatéralement le lien de travail s’il estime que le salarié manque à ses obligations.
Cependant, dans deux cas précis, la loi permet à l’employeur, d’exploiter la possibilité de la rupture par voie judiciaire. Il s’agit des cas où :
- il résilie l’accord d’apprentissage pour faute grave de l’apprenti, manquements réguliers à ses obligations et inaptitude à partir du 45ème jour de l’effectivité du lien de travail ;
- il résilie sur le plan judiciaire le CDD en cas d’inaptitude professionnelle et d’impossibilité de reclassement du salarié.
Comment sont appréciés les motifs de manquement ?
S’il est vrai que la jurisprudence dispose de nombreux motifs, qui selon les circonstances ont été considérés graves ou non, il faut dire que cela n’exclut pas une analyse au cas par cas du conseil des prud’hommes. En effet, le conseil prud’homal fera une appréciation spécifique, selon le dossier qui lui a été soumis, et appréciera selon les circonstances. La jurisprudence ici, servira à quelque peu éclairer l’appréciation du conseil, sans pour autant lui imposer une conduite.
Qu’elle soit à l’initiative du salarié ou de l’employeur, la demande de rupture par voie judiciaire de la relation contractuelle, est une procédure délicate, qui nécessite du recul, et un sens d’analyse avisé. C’est pourquoi il est recommandé de se faire accompagner d’un professionnel du droit, idéalement un avocat, afin d’optimiser ses chances de voir une éventuelle demande de résiliation judiciaire aboutir favorablement..
Quels sont les effets de la demande ?
La rupture par voie judiciaire du lien de travail emporte les mêmes effets que le licenciement sans cause réelle et sérieuse, comme évoqué supra. Elle prend effet à compter de la date de la décision judiciaire qui la prononce. Si avant l’aboutissement de la procédure, le salarié est licencié, la décision prend effet à compter de la date d’envoi de la lettre de licenciement.
Si une clause de non-concurrence avait été insérée dans le contrat de travail, le délai de renonciation à cette clause va jusqu’à la période du jugement ayant prononcé la rupture par voie judiciaire. Le délai n’est pas retardé au jour de la notification du jugement, ou au jour où le délai d’appel est arrivé à expiration.
Cette forme de rupture du lien de travail à des conséquences financières sur l’entreprise, lesquelles font bénéficier au salarié de :
- L’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ;
- L’indemnité compensatrice de préavis ;
- L’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Prononcée aux torts de l’employeur, la rupture du lien de travail par voie judiciaire produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Prononcée aux torts du salarié, elle le prive des indemnités légales et conventionnelles de licenciement.
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