Un legs: pour qui et comment?

La rédaction d’un testament est un préalable indispensable, qui plus est lorsqu’on envisage de céder un bien précis à un héritier, ou de lui octroyer un avantage particulier via un legs. Afin qu’il soit valable, ce dernier doit respecter certaines règles et conditions. Focus !

Qu’est-ce que c’est ?

En règle générale, cette opération porte dérogation aux bases de la dévolution successorale, et est une gratification consentie par testament, par le testateur à l’avantage d’un ou de plusieurs héritiers. Le but du testateur à travers ce procédé, est soit d’attribuer tout ou partie de son héritage à une personne qui normalement n’y était pas appelée, soit d’attribuer à l’un de ses héritiers légaux, une part excédant ce que la répartition normale de la succession lui aurait attribuée. Le bénéficiaire de cette gratification est appelé le légataire.

Toutefois, il convient de préciser qu’en cas d’atteinte à la réserve héréditaire, l’article 924-2 du Code Civil prévoit les conditions dans lesquelles l’indemnité de réduction sera calculée sur les biens donnés ou légués à l’époque du partage, et selon leur valeur au jour de prise d’effet de la libéralité. De leur côté, les articles 1004 et 1005 précisent qu’en présence d’héritiers réservataires, la gratification ne prend effet qu’à compter du jour de la demande en justice, ou de celui de la délivrance consentie en toute liberté.

De même est-il opportun de préciser que les libéralités consenties par le de cujus en faveur des légataires sont limitées par les droits des héritiers réservataires que la loi protège en leur garantissant une part minimale dont le testateur ne peut disposer librement, peu importe les conditions. S’il en disposait à son bon-vouloir, les personnes gratifiées aux mépris du droit des héritiers réservataires pourraient voir leur part réduite par jugement.

Les différents types

On distingue en matière successorale trois types :

  • legs universel : il permet au testateur de léguer tout son patrimoine à une personne désignée. C’est le légataire universel.
  • legs à titre universel : il permet au testateur de léguer à un bénéficiaire choisi une portion de son patrimoine. Le bénéficiaire est appelé légataire à titre universel.
  • legs particulier : il permet au testateur de léguer à un bénéficiaire désigné un bien déterminé (tableau, bijou, voiture).

Il importe de préciser que lors de la rédaction de son testament, le de cujus se doit d’être précis et clair sur cette libéralité, afin d’éviter les nombreux pièges attachés à une gratification ambiguë. La gratification est donc préciputaire, c’est-à-dire qu’elle s’ajoute aux droits des héritiers légaux. Plus précisément, si par exemple le testateur souhaite qu’après son décès, un de ses biens en particulier aille au patrimoine d’un de ses enfants, il se doit impérativement de le préciser dans son testament. Evidemment, ce dernier doit être écrit, daté et signé de la main même du testateur. Il doit aussi être inscrit au fichier central des dispositions des dernières volontés (FCDDV).

Les règles de la dévolution successorale

Même si la loi permet au testateur de faire une gratification, cette dernière doit respecter des règles bien précises, afin que les intérêts des uns et des autres soient protégés, indépendamment de la gratification. Ainsi, les enfants du testateur ont droit à une partie de la réserve à hériter, selon le nombre qu’ils sont au moment du décès de leur ascendant :

  • Si le testateur laisse un enfant, il ne peut léguer que la moitié de ses biens (la première allant d’office à l’enfant unique) ;
  • S’il laisse deux enfants, la quotité disponible représente le tiers de son patrimoine ;
  • S’il laisse trois enfants ou plus, il peut gratifier librement le quart de son patrimoine.

En outre, des dispositions existent quant à l’organisation de la quotité disponible pour le conjoint encore en vie et en présence d’enfants. Ainsi, la loi permet au de cujus, de son vivant, de mentionner dans son testament la transmission par gratification à son conjoint, d’une quotité disponible spéciale ; il s’agit d’un complément de son patrimoine, en plus de la quotité qui existe normalement, afin de le favoriser.

Qui peut bénéficier de cette libéralité ?

En théorie, toute personne peut bénéficier de cette libéralité que la loi permet au testateur, sauf deux catégories de personnes. Il s’agit :

  • Des médecins, pharmaciens et auxiliaires médicaux qui ont participé à dispenser des soins au défunt pendant sa maladie ;
  • Des ministres de cultes (prêtres, pasteurs, rabbins) qui sont soumis à la même limitation que les médecins, s’ils ont exercé une influence avant le décès du testateur.

Il faut préciser à ce niveau que les bénéficiaires de la libéralité doivent s’acquitter des droits de succession liés à l’héritage. La succession ne confère aucun avantage fiscal et est taxée aux droits de mutation à titre gratuit (DMTG) selon un barème progressif. Les membres de la famille bénéficient d’abattements de l’ordre de 100.000 euros pour les enfants et 1.594 euros pour les petits-enfants. Le conjoint survivant est exonéré de droits de succession. Par contre, la libéralité faite par le défunt à un de ses amis, serait taxée à hauteur de 60%.

Aménagement du contenu de l’opération d’attribution d’héritage

Une fois les libéralités faites aux bénéficiaires de manière universelle, à titre universel ou en particulier, le testateur doit en aménager le contenu.

Ainsi, la loi lui permet de faire une gratification avec charges et conditions. Si celles-ci ne sont pas respectées par le ou les bénéficiaires, la gratification ne pourra pas leur être attribuée. Par exemple, le de cujus peut indiquer que le légataire doit délivrer une somme d’argent à une personne désignée. Il peut préciser que le bénéficiaire ne doit pas vendre le bien objet de la libéralité pendant un temps. Dans ce cas, on dit alors que la donation héréditaire est avec clause d’inaliénabilité.

Lors de la rédaction de sa gratification, la loi permet au testateur de désigner un personne qui se chargera de l’exécution du testament. Il s’agit généralement d’une personne de confiance qui, au décès du testateur, a la charge de procéder à l’exécution de ses dernières volontés. L’exécuteur testamentaire peut donc être chargé par le de cujus de :

  • Délivrer les gratifications aux bénéficiaires,
  • S’assurer que les conditions et les charges contenues dans le testament soient respectées.

En outre, en rédigeant ses libéralités, le testateur peut désigner le bénéficiaire de son assurance vie. Il peut ainsi :

  • Désigner le bénéficiaire de sa gratification jusqu’à son décès ;
  • Avoir la certitude que son contrat d’assurance vie ne sera pas perdu s’il enregistre sa libéralité au FCDDV.

Le cas des libéralités particulières

La loi prévoit des cas particuliers. Ils consistent à léguer par testament un ou plusieurs biens déterminés à une ou plusieurs personnes désignées. Est par exemple classé dans cette catégorie le fait de léguer des meubles ou de l’argent mis sur un compte bancaire.

Le bénéficiaire de ce type de libéralité doit toujours s’adresser aux autres héritiers ou légataires universels, pour demander la délivrance de sa gratification. Ce n’est qu’au jour de cette demande qu’il pourra jouir de la gratification qui lui a été faite. Il n’est en outre aucunement tenu des dettes du défunt.

Dans l’organisation de ce type de libéralité, le code Civil va plus loin et opère une distinction sur l’objet de transmission et dans la définition de chaque libéralité, afin de limiter les conflits de qualification (article 1002, 1010, 1014 et 1024).

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